UN ARTICLE QUI NOUS FAIT COMPRENDRE BIEN DES CHOSES
AUTEUR : Gilad ATZMON جيلاد أتزمون
Le droit à l’autodétermination est une approche luxueuse de la conservation du pouvoir réservée aux riches, aux forts et aux privilégiés. Vu que les sionistes tiennent les rênes du
pouvoir politique international, en raison de leur influence dans des positions de pouvoir importantes, ainsi que la puissance militaire leur permettant de défendre leur droit à
l’autodétermination, tout débat politique, actuellement, sur la légitimité de ce concept, ne peut qu’inévitablement conduire à un déni de ce que nous en sommes venus à reconnaître comme
le droit palestinien à l’autodétermination.
Pourtant, au lieu d’exiger ce droit, actuellement impraticable, nous devrions lutter pour défendre le droit des Palestiniens et des Arabes à se rebeller contre l’État juif et contre
l’impérialisme sioniste mondial. Au lieu de perdre notre temps dans des fantasmagories rhétoriques, nous ferions bien mieux de dénoncer la politique et la pratique tribales juives pour ce
qu’elles sont.Soutenir la Palestine, c’est avoir le courage de dire ce que nous pensons et d’admettre ce que nous voyons.
L’autodétermination juive telle qu’elle s’est appliquée en Palestine de 1946 à 2000
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Un citoyen du monde, cosmopolite et athée
L’année dernière, dans une petite église d’Aspen, dans le Colorado, lors du débat faisant suite à ma conférence, une personne dans le public, d’âge moyen, se leva au fond de la salle, et
se présenta ainsi :
« Je suis un citoyens du monde, je suis cosmopolite et athée. Je voudrais vous poser une question, M. Atzmon... »
Je l’ai interrompu : « Un moment - ne soyez pas vexé par ma question, mais, ne seriez-vous pas juif, par hasard ? »
L’homme s’est figé une seconde ; il n’a pu s’empêcher de rougir, tout le monde, dans le public, s’étant tourné vers lui. Peut-être étaient-ils curieux de voir à quoi ressemblait un
cosmopolite fier de l’être au XXIème siècle ? Personnellement, je me sentais un peu coupable, dans toute cette affaire, n’ayant pas la moindre intention de mettre l’homme dans
l’embarras. Toutefois, il lui fallut un temps certain pour retrouver ses esprits...
« Oui, Gilad, je suis juif. Mais comment l’avez-vous deviné ? »
« Je n’en savais rien, en fait », ai-je répondu, « je n’ai fait que deviner. « C’est que, voyez-vous, quand je me trouve face à des gens qui se proclament
« cosmopolites », « athées » et « citoyens du monde », il s’avère que ce sont tous, en général, des « juifs » de la catégorie assimilée soi-disant
« progressiste ». Je ne puis que supposer que les « non-juifs » ont tendance à vivre en paix avec ce leur identité donnée. S’ils sont nés catholiques et qu’ils
décident, à un certain stade de leur vie, de changer, ils se contentent de laisser tomber leur église. S’ils n’aiment plus leur pays autant que les autres, sans doute prennent-ils leurs
cliques et leurs claques et choisissent-ils un autre pays pour aller y vivre... D’une certaine manière, les « non-juifs » - c’est loin d’être une règle scientifique - n’ont nul
besoin de se dissimuler derrière quelque vagues bannières universelles ni quelque système artificiel de valeurs vertueuses. Mais c’était quoi votre question, au juste ? »
Il n’y eut pas de question. Notre « citoyen du monde cosmopolite et athée » ne se souvenait plus de sa question ! Je suppose que, suivant la tradition des juifs d’après
l’émancipation, il n’était là que pour célébrer en public son droit à l’autodétermination... L’homme se servait du débat pour dire à ses voisins et à ses amis d’Aspen à quel point il
était un être humain grandiose. Contrairement à eux, des croyants patriotes locaux, Américains et fiers de l’être, lui, il était un humaniste avancé, un homme au-delà de la nationalité,
un sujet sans patrie et sans dieu. Il était le nec plus ultra du produit rationnel « autodéterminé » des Lumières. Il était l’enfant de Voltaire et de la Révolution
française !...
L’autodétermination est une maladie épidémique juive, moderne, politique et sociale. La disparition du ghetto et de ses qualités maternantes a conduit à une crise d’identité au sein d’une
société juive largement assimilée. Apparemment, toutes les écoles de pensée juives d’après l’émancipation, qu’elles soient politiques, spirituelles ou sociales, de gauche, de droite ou du
centre, étaient intrinsèquement préoccupées par des questionnements autour du « droit à l’autodétermination ». Les sionistes allaient revendiquer le droit à l’autodétermination
nationale sur la terre de Sion. Le Bund, quant à lui, allait exiger l’autodétermination nationale et culturelle, mais dans le cadre du discours prolétarien d’Europe de l’Est. Le Matzpen
et les ultragauchistes israéliens allaient exiger le droit à l’autodétermination de la « nation juive israélienne » dans « l’ Orient arabe libéré », et les juifs
antisionistes allaient insister sur le droit à se livrer à un discours juif ésotérique au sein du mouvement de solidarité avec la Palestine. Mais qu’est-ce donc que ce droit à
l’autodétermination, au fait ? Comment se fait-il que toute pensée politique juive moderne soit fondée sur ce droit ? Pour quelle raison certains juifs
« progressistes » assimilés ressentent-ils le besoin de devenir des citoyens du monde, plutôt que de se considérer comme de simples citoyens britanniques, français ou
russes ?
Le simulacre de l’authenticité
Il faut dire que, bien que la recherche d’identité et d’autodétermination ne servent en réalité qu’à véhiculer le simulacre d’une marche finale vers une authentique rédemption, le
résultat direct des politiques de l’identité et des affaires d’autodétermination est à l’exact opposé. Ceux qui doivent autodéterminer qui ils sont ceux-là mêmes qui sont, pour commencer,
extrêmement éloignés de toute réalisation authentique. Ceux qui sont déterminés à être perçus comme des « humanistes cosmopolites et laïcs » sont précisément ceux qui ne
comprennent pas que la fraternité humaine n’a besoin ni d’une introduction ni d’une déclaration. Tout ce que la fraternité humaine requiert, c’est un amour authentique du prochain. Ceux
qui lancent et signent des manifestes humanistes sont ceux-là mêmes qui insistent à être perçus comme des humanistes, tout en répandant autour d’eux des vilenies tribales sionistes !
Manifestement, les cosmopolites authentiques n’ont pas besoin de déclarer leur engagement abstrait envers l’humanisme. De même, les vrais citoyens du monde vivent, tout simplement, dans
un monde ouvert, sans barrières ni frontières.
Moi-même, par exemple, je suis entouré de musiciens de jazz de toutes les couleurs et de toutes origines ethniques. De gens qui vivent sur la route, qui dorment chaque nuit dans un
continent différent, des gens qui ont fait de leur amour de la beauté leur gagne-pain. Pourtant, je n’ai jamais rencontré d’artiste de jazz qui se qualifie de citoyen du monde, de
cosmopolite, ou même de marchand de beauté. Je n’ai jamais rencontré d’artiste de jazz qui aurait adopté un air d’importance égalitaire. Je n’ai jamais rencontré un musicien de jazz qui
célèbre son droit à l’autodétermination. La raison en est simple : les être authentiques n’ont nul besoin d’autodéterminer qui ils sont, ils se contentent juste d’être et de laisser
être.
Le droit à l’autodétermination
Le droit à l’autodétermination est souvent cité comme la reconnaissance du fait que « tous les peuples ont le droit de déterminer librement leur statut politique et de poursuivre
librement leur développement économique, social et culturel ». Ce principe même est souvent perçu comme un droit moral et légal. Il est aussi très implicite dans la philosophie des
Nations Unies. Le terme d’autodétermination se trouve dans la Charte des Nations Unies et il a été défini dans diverses déclarations et conventions.
Bien que nous ayons tous tendance à croire que tout être humain est fondé à célébrer ses symptômes, le droit à l’autodétermination ne prend tout son sens que dans le cadre du discours
libéral occidental qui admet un tel droit avec le présupposé de la notion d’individualisme éclairé. De plus, le droit à l’autodétermination ne peut être célébré que par des privilégiés à
même de mobiliser suffisamment de pouvoir politique ou de force militaire pour faire de ce droit une réalité concrète.
Toutefois, il convient de mentionner qu’y compris au sein du discours libéral occidental, les juifs sont les seuls à fonder leur puissance politique sur leur revendication du droit à être
comme les autres. La raison en est simple : même si les juifs libérés insistent tellement à être comme les autres, il est plutôt évident que les autres préfèrent, de fait, être
« comme eux-mêmes ». Cela signifie, à l’évidence, que l’exigence formulée par les juifs - d’être comme les autres - est vaine et condamnée à l’échec.
Il faut aussi mentionner qu’au sein de sociétés opprimées, le droit à l’autodétermination est souvent remplacé par le droit à la rébellion. Pour un Palestinien des territoires
occupés, le droit à l’autodétermination ne veut pas dire grand-chose. Il n’a nul besoin de s’autodéterminer en tant que Palestinien, pour la raison évidente qu’il sait parfaitement bien qui
il est. Et au cas où il l’oublierait, un militaire israélien, au prochain barrage routier, aurait vite fait de le lui rappeler. Pour les Palestiniens, l’autodétermination est le produit
d’une négation. C’est en réalité la confrontation quotidienne avec le déni sioniste du droit des Palestiniens à l’autodétermination. Pour un Palestinien, c’est le droit de lutter contre
l’oppression, contre ceux qui le réduisent à la famine et l’expulsent de sa terre au nom de l’exigence bien-trop-concrète, de la part des juifs, d’être « un peuple comme les
autres ».
Ainsi, alors que le droit à l’autodétermination veut se faire passer pour une valeur universelle de libération politique, il est utilisé, dans bien des cas, comme un mécanisme de
division, qui aboutit à des abus directs contre les autres. Comme nous sommes bien obligés de le savoir, la revendication juive contemporaine du droit à l’autodétermination est bien trop
souvent célébrée aux dépens d’autres que les juifs, qu’il s’agisse des Palestiniens, de leaders arabes, du prolétariat russe ou de soldats britanniques et américains combattant la
dernière poche des ennemis d’Israël au Moyen-Orient. Autant le droit à l’autodétermination est présenté occasionnellement comme une valeur universelle, autant l’examen de l’utilisation
sinistrement pragmatique de ce même droit dans le cadre du discours politique juif met en évidence qu’en termes concrets, ce droit à l’autodétermination n’a d’autre fonction que de servir
les intérêts tribaux juifs, tout en déniant et même en rejetant les droits élémentaires d’autres peuples.
Le Bund et la critique de Lénine
Il serait correct de dire que le Bund et les sionistes furent les premiers à insister, avec éloquence, sur le droit des juifs à l’autodétermination. Le Bund était l’Union Générale des
Travailleurs Juifs d’Europe orientale. Comme le mouvement sioniste, il fut officiellement fondé en 1897. Il affirmait que les juifs vivant en Russie méritaient le droit à une
autodétermination culturelle et nationale, à l’intérieur de la future révolution soviétique.
Le premier, probablement, à avoir développé un argumentaire sur l’absurdité de l’exigence juive d’autodétermination fut Lénine, dans sa célèbre diatribe contre le Bund, lors du Deuxième Congrès du Parti Social-Démocrate Russe des
Travailleurs (en 1903).
« Marchez avec nous ! », avait répliqué Lénine au Bund, rejetant l’exigence, par les bundistes, d’un statut ethnique autonome spécial parmi les travailleurs russes. Lénine,
à l’évidence, avait repéré l’agenda tribal atomisant au cœur de la philosophie bundiste. « Nous rejetons », avait dit Lénine, « toute partition forcée qui ne servirait qu’à
nous diviser ». Autant Lénine soutenait le « droit des nations à l’autodétermination », autant il rejetait clairement un tel droit pour les juifs, qu’il avait identifié à
juste titre comme diviseur et réactionnaire. Lénine défendait le droit des nations opprimées à édifier leurs propres entités nationales, toutefois, il résistait à tout état d’esprit
nationaliste doctrinaire et étroit.
Lénine opposa trois objections fondamentales au Bund et à sa revendication d’autodétermination culturelle :
1°- Lancer le slogan de l’autonomie nationale et culturelle, cela amène à diviser les nations, et par conséquent à détruire l’unité du prolétariat au sein de ces nations ;
2° - Lénine pensait que l’inter-mélange entre nations et leur amalgamation étaient des phases progressives, tandis qu’aller dans le sens opposé à cette tendance revenait à régresser. Il
critiquait ceux qui « élèvent leurs cris au ciel contre l’assimilation » ;
3° - Lénine ne considérait ni avantageuse, ni pragmatique, ni faisable, l’indépendance culturelle déterritorialisée que prônaient le Bund et d’autres partis politiques juifs.
L’approche que Lénine avait du Bund est très significative, et elle est à méditer. Usant de son bon sens politique acéré, Lénine doutait des fondements éthiques et politiques d’un droit
des juifs à l’autodétermination, d’autant que le Bund revendiquait pour les juifs un traitement comme nation dotée de son identité propre, comme tous les autres nationaux. La réponse de
Lénine fut d’une stricte simplicité : « Désolé, les gars, mais vous ne l’êtes pas. Vous n’êtes pas une minorité nationale, pour la simple raison que vous n’êtes rattachés à
aucun territoire géographique !... »
Le Matzpen et Wolfowitz
« La solution des problèmes nationaux et sociaux de cette région ne peut provenir que d’une révolution socialiste dans cette région, qui renversera tous les régimes en place, et y
substituera une union politique régionale, gouvernée par les travailleurs. Dans cet Orient arabe uni et libéré, la reconnaissance sera assurée aux droits à l’autodétermination (y compris
au droit à un Etat séparé) de chacune des nationalités non-arabes vivant dans la région, y compris la nation israélienne-juive » (Principes du parti Matzpen)
Apparemment, la critique formulée par Lénine n’a jamais été correctement intériorisée par les idéologues juifs soi-disant « progressistes ». L’abus des autres, et le rejet de
leurs droits élémentaires sont devenus partie inhérente de la pensée politique « progressiste » juive. La lecture du document fondateur du Matzpen, ce légendaire groupe
gauchiste israélien, ne peut que laisser perplexe.
Les matzpénistes juifs déjà en 1962 avaient un plan pour « libérer » le monde arabe ! D’après les principes du Matzpen, il suffit de renverser tous les régimes (arabes)
existants, afin que soit garanti le droit à l’autodétermination de chacune des nationalités non-arabes vivant dans la région, y compris (bien sûr)) la nation juive israélienne...
Nul besoin d’être un génie pour comprendre qu’au moins au niveau des catégories, les principes du Matzpen ne diffèrent en rien du mantra néocon de Wolfowitz et consorts. Le Matzpen avait
un plan pour renverser tous les régimes arabes, au nom du socialisme, afin que les juifs pussent autodéterminer qui ils étaient, au juste. Wolfowitz voudrait faire exactement la même
chose, au nom de la démocratie. Si vous prenez le texte fondateur judéo-centrique progressiste du Matzpen et que vous y remplacez le mot socialiste par le mot démocratique, vous vous
retrouverez avec un texte néocon dévastateur :
« La solution des problèmes nationaux et sociaux de cette région ne peut provenir que d’une révolution démocratique dans cette région, qui renversera tous les régimes en place, et y
substituera une union politique régionale. La reconnaissance y sera assurée aux droits à l’autodétermination de chacune des nationalités non-arabes vivant dans la région, y compris la
nation israélienne-juive ».
Apparemment, tant le « légendaire » Matzpen progressiste que les lamentables néocons réactionnaires recourent à un même concept abstrait, non sans prétendre à l’universalité,
pour justifier rationnellement le droit juif à l’autodétermination et la destruction de tout pouvoir régional édifié par les Arabes. Apparemment, tant les néocons que le Matzpen savent
exactement ce que peut signifier la libération pour les Arabes. Pour les matzpénistes, libérer les Arabes, c’est en faire des bolcheviks. Le néocon, est, lui, plus modeste : tout ce
qu’il veut, c’est que les Arabes boivent du Coca-Cola dans une société démocratique occidentalisée. L’une comme l’autre, ces deux philosophies judéo-centriques sont condamnées à l’échec,
car la notion d’autodétermination est à 150 % euro-centrique. L’une comme l’autre, ces deux philosophies sont fondées sur une notion de rationalité issue des Lumières. Elles n’ont
pratiquement rien à offrir aux opprimés, elles ne servent au contraire qu’à rationaliser et à fournir au colonialisme une fausse légitimité « universaliste ».
Clairement, le Matzpen n’a jamais eu un quelconque pouvoir politique ; il n’a jamais eu la moindre importance politique, étant donné qu’il n’a jamais eu la moindre proximité avec des
Arabes, pour ne pas parler des masses arabes. Par conséquent, le Matzpen n’a jamais pu en quoi que ce soit affecter la vie des peuples arabes, ni détruire leurs régimes politiques. Mais
le Matzpen est considéré, par les gauchistes juifs du monde entier, comme un chapitre significatif dans l’histoire de la gauche israélienne. Ce mouvement est considéré comme un moment
singulier dans le réveil moral israélien. Aussi est-il, en vérité, embarrassant, pour ne pas dire dévastateur, de découvrir que le moment le plus éclairé et le plus raffiné du réveil
moral de la gauche israélienne a produit une vision politique qui ne diffère en rien, dans ses catégories, de l’infâme tentative de libération du peuple irakien par George Bush ! Il
devrait être éclatant que les ultragauchistes juifs (à la Matzpen) et l’interventionnisme anglo-américain sionisé (à la néocon) sont, de fait, les deux faces de la même médaille, ou, si
vous préférez, du seul et même shekel. Ils sont extrêmement proches sur les plans théorique, idéologique et pragmatique. La pensée politique des uns et des autres est judéo-centrique
jusqu’à la moelle, mais cela ne les empêche nullement de prétendre se fonder sur l’universalisme et tendre vers la libération et la liberté. Mais, en définitive, leur raison d’être n’est
rien d’autre que l’autodétermination juive, aux dépens de non-juifs.
Le droit à être comme les autres - la logique sioniste
Je cite ci-après une collecte d’extraits d’un document soumis à la Commission
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Le droit à l’autodétermination : un simulacre d’universalisme
mercredi 2 avril 2008 , par Mehr Licht
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